Youssef Hocine : de l’escrimeur de légende au porteur de flamme olympique, un parcours inspirant au cœur de la Seine-et-Marne
Youssef Hocine est un ancien escrimeur qui a fait toute sa carrière au cercle d’escrime de Melun Val-de-Seine. Aujourd’hui Maître d’Armes dans ce même club, Youssef Hocine a porté les couleurs melunaises au plus haut niveau mondial avec un palmarès digne d’un grand champion, médaille d’argent et de bronze aux championnats du monde. Aujourd’hui, sa maladie ne lui permet plus de pratiquer ce sport depuis une dizaine d’années. Il continue pour autant d’entraîner et sera prêt à porter la flamme olympique le 20 juillet pour ainsi faire rayonner le département de Seine-et-Marne.
Youssef, votre palmarès est impressionnant :
- Médaille d’argent au fleuret par équipe aux championnats du monde 1987 à Lausanne.
- Médaille de bronze au fleuret individuel aux championnats du monde 1991 à Budapest.
- Médaille de bronze au fleuret par équipe aux championnats du monde 1991 à Budapest.
Vous êtes un habitué des podiums ! Quelle est votre ou vos plus belles médailles ?
Celle dont je suis le plus fier est la médaille de bronze au fleuret individuel que j’ai obtenu aux championnats du monde à Budapest en 1991. Je suis également heureux d’avoir gagné la coupe du monde junior lorsque j’avais moins de 20 ans. Cela représentait plusieurs compétitions internationales à jouer dans l’année, avec une accumulation de points qui m’ont permis d’arriver le premier ! Bien entendu je suis également très fier de mes médailles de bronze aux jeux olympiques.
Vous avez aussi été sélectionné pour les jeux de Séoul en 1988 et ceux de Barcelone en 1992, quels souvenirs gardez-vous de ces jeux notamment ceux de Séoul qui se sont déroulés dans un contexte politique particulier ? L’avez-vous ressenti en tant qu’athlète ?
En tant que sportif, je n’ai pas été impacté par ce contexte car premièrement chacun de nous était concentré sur sa participation et sur sa performance sportive, tout était fait pour nous préserver et ne pas être perturbé par ce contexte politique assez lourd et surtout pour les coréens. Nous étions dans une bulle sous bonne protection.
J’imagine que vous suivrez avec attention le parcours des escrimeurs et escrimeuses françaises pendant les JO, avez-vous prévu de participer aux compétitions ? Selon vous quels sont nos espoirs de médailles ?
À part Enzo Lefort (club de Melun) je ne connais pas bien les escrimeurs sélectionnés car je ne suis plus vraiment dans le système mais bien entendu je vais suivre à la télévision comme tout un chacun. En revanche, j’ai eu deux places pour la compétition handisport d’escrime qui aura lieu au Grand Palais à Paris.
Aujourd’hui, malgré votre maladie, vous continuez de dispenser des leçons aux scolaires, quel est votre rapport à l’handicap et comment est-il perçu par les jeunes que vous entrainez ?
J’ai été diagnostiqué en 2010, la sclérose en plaques est comme vous l’imaginez une maladie très handicapante, avec des problèmes de mobilité dû à la faiblesse musculaire, des problèmes d’équilibre, des vertiges…mais cela ne m’empêche pas de continuer mes missions car je suis employé par la mairie de Melun en tant qu’éducateur sportif, pour enseigner l’escrime auprès des scolaires des classes de CE2 à CM2. Je suis assisté par Patrice Lhôtellier* qui m’aide à dispenser ses cours qui durent cinq semaines. Ce qui est extraordinaire avec les enfants c’est qu’ils ne jugent pas et non pas d’aprioris. Depuis que je suis en fauteuil, aucun d’entre eux ne m’a posé de question sur mon handicap, à leurs yeux je suis comme tout le monde !
Quelle a été votre réaction après avoir été sélectionné pour porter la flamme olympique et comment cela va-t-il se passer ?
La ville de Melun nous en avait un peu parlé et le Département de Seine-et-Marne m’a contacté pour m’annoncer que je serai porteur de la flamme le 20 juillet prochain ! Maintenant j’attends des informations du COJO et la confirmation du parcours sur la commune. Je suis vraiment très fier de pouvoir porter cette flamme car à défaut de ne pas faire les jeux je vais y participer d’une autre façon.
Vous vous intéressez à d’autres sports ?
Je suis les sports équestres pour la simple et bonne raison que ma fille fait de l’équitation donc je me suis intéressé à ce sport. Mais j’aime beaucoup le judo en sport individuel et en sport collectif le handball, on n’en parle pas beaucoup mais nous avons de grands champions en équipe de France !
Vous êtes en Seine-et-Marne depuis toujours, que vous évoque ce département, qu’est-ce que vous aimez le plus ?
Je suis un pur seine-et-marnais, je suis né à Melun et j’habite Vaux-le-Pénil, pour la petite anecdote, l’ambulance n’a pas réussi à arriver jusqu’à la maternité et je suis né place Saint-Jean !
Je connais la Seine-et-Marne depuis toujours, j’ai un attrait particulier pour la forêt de Fontainebleau et sa ville. C’est un département à la campagne mais sa proximité de Paris m’a permis de pouvoir suivre les entraînements et de rentrer chez moi le soir, au vert.
J’ai beaucoup voyagé lors des différentes compétitions auxquelles j’ai participé, j’en ai vu du Pays ! Maintenant avec ma maladie, les déplacements sont de plus en plus difficiles même si je possède un fauteuil électrique dernière génération. La situation de handicap reste encore très compliquée en France mais également quand on veut voyager.
Vous avez deux enfants, une fille et un garçon, votre fille fait de l’équitation et votre fils ? Ce sont-ils essayés à l’escrime ?
Ma fille a essayé l’escrime mais je lui ai suggéré de revenir à l’équitation ! Quant à mon fils c’est un « touche à tout » : il a fait de l’escrime, du judo, de l’aviron, il a essayé pas mal de sports mais pour tout vous dire mon épouse a un peu freiné des quatre fers pour que notre fils continue l’escrime car elle avait peur que ça entache nos relations car c’est un sport très exigeant comme beaucoup. Ils se consacrent tous les deux à l’équitation et ils sont très bien classés !
Quel est votre état d’esprit concernant les prochains JO ou le passage de la flamme ?
J’espère que la flamme ne me brûlera pas ! Je suis très fier de la porter mais en même temps je suis partagé entre la joie que me procure cet événement et toute la complexité d’organisation et d’accessibilité que représentent ces épreuves.
. Malheureusement je pense que beaucoup de français suivront les jeux à la télévision comme nous ! Mais ce n’est pas grave, puisqu’on a prévu d’inviter des amis et de les suivre ensemble pour ainsi fêter le sport comme il se doit !
Un dernier mot pour conclure la fin de cet interview ?
Oui, un dernier mot sur mon comparse depuis plus de 40 ans, Patrice Lhôtellier. On se connait depuis l’âge de 12 ans, nous avons été copains de chambrées lors de nos diverses compétitions. Il a lui aussi un palmarès impressionnant : médaille d’or au fleuret aux Jeux olympiques d’été de 2000 à Sydney en Australie, médaille d’or au fleuret par équipe aux championnats du monde 1997 au Cap en Afrique du Sud, médaille d’or au fleuret par équipe aux championnats du monde 1999 à Séoul en Corée du Sud etc…. Et surtout il m’aide beaucoup dans mes missions, c’est un ami de toujours et un véritable soutien au quotidien.
* Patrice Lhôtellier est un escrimeur français. Membre de l’équipe de France de fleuret, il a été médaillé lors des Jeux olympiques et des championnats du monde. Patrice Lhôtellier est membre du Cercle d’escrime Melun Val de Seine. Il en est également l’un de ses maîtres d’armes.